Le viaduc de la Concorde. Les victimes doivent être indemnisées selon Marc Bellemare

20/10/2007 07h36

L’ex-ministre de la Justice dans le gouvernement Charest, Me Marc Bellemare, est convaincu qu’une large brèche est maintenant créée dans le régime du «no fault» au Québec et qu’il sera possible d’obtenir une juste compensation pour les victimes de l’effondrement du viaduc de la Concorde, à Laval.

Le réputé avocat de Québec a confié qu’il travaille depuis mai dernier auprès des proches de personnes décédées lors de cette tragédie et d’autres qui ont subi des blessures ou des dommages majeurs. Il n’a pas encore accepté un mandat formel pour les représenter mais il ne fait pas de doute pour lui qu’il ne s’agit pas d’un accident au sens de la loi de la SAAQ, comme l’a affirmé à l’Assemblée nationale la ministre des Transports, Julie Boulet, qui se refuse à toucher au «no fault».

«il faut d’abord expliquer les choses aux clients. On doit s’attendre que le dossier se rende jusqu’à la Cour suprême du Canada, ce qui suppose des délais de 6 à 10 ans.»

D’autre part, «les victimes n’ont pas d’argent pour mener une telle bataille. Ça prend des avocats qui sont capables de travailler pour rien. Mais ça, je l’ai déjà fait ! D’ici le printemps, une décision sera prise…».

Le gouvernement est coincé

Me Bellemare croit enfin détenir son os. Il a été convaincu de se présenter pour le Parti libéral du Québec, en 2003, parce que Jean Charest lui faisait miroiter une modification à la loi de la Société de l’assurance automobile sur le «no fault». Lorsqu’il a compris que le premier ministre ne tiendrait pas parole, il a démissionné, le 28 avril 2004. Le rapport de la Commission Johnson est un retour du pendule. Mais la bataille juridique sera rude, longue et coûteuse, prévoit-il.

«Tous ceux qui ont»challengé«le»no fault«se sont retrouvés devant une batterie d’avocats, ceux de la SAAQ, des ingénieurs, des constructeurs, tous ceux qui auraient un intérêt juridique ou financier», rappelle-t-il. Me Bellemare soutient que «le gouvernement du Québec a tout intérêt à ce que sa loi soit interprétée de la façon la plus large possible. J’ai toujours dit que le plus grand gagnant du régime, c’était l’État. Dix pour cent des accidents sont causés par l’état du réseau routier, un mavais entretien, une mauvaise conception. C’est 5000 personnes qui ne sont pas justement indemnisées», avance-t-il.

Injustices

«Dès que la calculatrice s’est éteinte pour les poursuites civiles, l’entretien du réseau s’est détérioré», jette l’avocat des accidentés.

Me Bellemare reste amer à la suite de certaines injustices constatées. En juin 1978, un urgentologue de Québec a été débouté au terme d’une lutte de six ans, aprs que sa conjointe ait été heurtée par un chauffard en état d’ébriété. En 1995, le Protecteur du citoyen, Daniel Jacoby, a recommandé de modifier la loi de la SAAQ à la suite du décès d’un enfant de cinq ans. Le véhicule conduit par son père avait fait une violente embardée sur l’Autoroute Métropolitaine à Montréal, en raison du mauvais entretien de la chaussée. Rien n’a été fait.

L’ex-ministre de la Justice prédit qu’une requête en irrecevabilité sera instantanément déposée par la SAAQ dès qu’il voudra contester l’indemnisation par cette société d’État des victimes de l’effondrement du viaduc, ce qui enclenchera d’interminables procédures jusque devant le plus haut tribunal du pays.