PACTE DE SUICIDE: L’inaction de la SAAQ mise en cause

«Quand on est normal, avec une vie normale, on peut se défendre. Mais quand notre vie s’écroule et qu’on est détruit par un handicap, l’impact de refus répétés et de lutte continuelle n’est pas le même. C’est une forme de mépris de la part de la SAAQ, qui gère ses dossiers bien souvent seulement sur une base économique»

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Pour l’ex-ministre de la Justice,  il ne fait aucun doute que l’acharnement de la SAAQ a joué un rôle dans le suicide d’Annie et Mario Beaudoin.

«C’est clair, clair, clair dans ma tête», lance Me Bellemare, qui représentait le couple depuis presque un an.

«Depuis le début, ils se battaient sur tous les fronts: pour de l’aide personnelle, pour une indemnité de remplacement de revenu et pour obtenir un équipement spécialisé afin que Mario puisse faire des exercices pour ses jambes. C’était une lutte continuelle», explique l’avocat.

Quelques jours à peine après l’accident, une travailleuse de la SAAQ avait rencontré Annie. «Dans le rapport, il est écrit que la conjointe était très ébranlée et dévastée, qu’elle avait l’impression d’être morte depuis l’accident et qu’elle était inquiète pour son conjoint», raconte Me Bellemare.

Détresse

En juillet dernier, dans un autre rapport psychologique, Mario émettait des idées suicidaires. «On n’a pas tenu compte de leur état psychologique. C’est inacceptable que la SAAQ ne prenne pas conscience de l’impact de ses décisions sur les gens», enchaîne Me Bellemare

 

— Jean LaRoche / Le Journal de Québec

 

Les proches d’Annie et Mario Beaudoin, le couple qui s’est suicidé à Saint-Félicien la semaine dernière, ne peuvent pas expliquer l’inaction de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) malgré de nombreux appels à l’aide lancés au cours des derniers mois.

C’est en décembre 2012 que la vie du couple a basculé, lorsque Mario a été victime d’un terrible accident de la route. «Il est devenu tétraplégique et n’avait plus aucune autonomie. Il ne pouvait rien faire par lui-même, ni manger, ni aller à la salle de bain, ni même ramasser un objet qu’il échappait. Il ne pouvait plus rien faire», laisse tomber Denise Beaudoin, sœur d’Annie, au cours d’une entrevue accordée au Journal.

Dès lors, Annie a tout mis de côté pour aider son mari du mieux qu’elle le pouvait. «Ils avaient toujours vécu en symbiose. Aider Mario, c’était devenu la chose la plus importante pour ma sœur. De toute façon, elle ne pouvait jamais le laisser seul. Il ne pouvait rien faire par lui-même», poursuit-elle.

Nombreux ennuis

Au fil des mois, les ennuis avec la SAAQ se sont multipliés. «Tout était compliqué. Un an après l’accident, leur maison n’était toujours pas adaptée. Les cadres de porte n’étaient pas élargis pour la chaise roulante de Mario, la salle de bain non plus. Il ne pouvait même pas prendre sa douche», raconte-t-elle.

Pour le couple, tout semblait toujours à recommencer. «Il n’y avait personne d’attitré à leur dossier. S’il y avait un problème avec la chaise roulante, ils appelaient quelqu’un. Si c’était le lit, il fallait faire appel à quelqu’un d’autre. Pour eux, c’était énormément de stress, de perte de temps et de casse-tête. Ils devaient toujours se battre pour tout. La SAAQ a agi sans aucune compassion. Ils attendaient qu’ils se découragent.»

Appel à l’aide

Après quelques mois de luttes continuelles, la dépression s’est installée chez Annie et Mario. «J’étais tellement inquiète que j’ai appelé le médecin de ma sœur. Je lui ai dit qu’il était temps de s’occuper de leur état psychologique. J’avais peur qu’ils se rendent au suicide», affirme Mme Beaudoin.

La semaine dernière, le pire s’est produit et le couple a été retrouvé sans vie dans sa maison de Saint-Félicien. «Mario disait souvent que, quand il n’aurait plus d’espoir, il saurait quoi faire. Annie, elle, ne se voyait pas vivre sans lui. Elle aurait fait n’importe quoi pour Mario. La preuve, elle a donné sa vie pour lui procurer ce qu’il voulait.»

«Si la SAAQ leur avait rendu la vie plus facile, les choses auraient pu se passer autrement. Il faut avoir vécu beaucoup de douleur intérieure pour se rendre au pacte de suicide», poursuit Mme Beaudoin.

Les funérailles du couple auront lieu aujourd’hui, à Saint-Félicien