L’hôpital d’Edmundston mis en demeure après avoir perdu un foetus
La petite Floralie était très attendue par Pierre-Luc Richard, Noémye Shareck et leurs trois enfants en bas âge, que l’on voit ici dans leur domicile. À la déception de voir son fœtus périr à cinq mois s’est ajoutée celle de ne pas pouvoir récupérer le corps de la jeune défunte. L’Hôpital régional d’Edmundston a admis une « erreur de manipulation ».
Dominic Lelièvre Journal de Quebec
JOURNAL DE QUEBEC
MISE À JOUR
Un couple du Bas-Saint-Laurent dont le fœtus de cinq mois a été égaré par le personnel d’un hôpital néo-brunswickois, avant d’être vraisemblablement incinéré par erreur, somme l’établissement de s’expliquer dans une mise en demeure.
Noémye Shareck et Pierre-Luc Richard ont l’impression d’avoir perdu deux fois leur enfant. La première fois lorsque le personnel de l’Hôpital régional d’Edmundston leur a expliqué, à la fin mars, que leur petite fille à naître, Floralie, était décédée dans le ventre de sa maman. La deuxième fois lorsque, une semaine plus tard, un employé leur a annoncé que le fœtus mort-né était introuvable.
Après l’accouchement provoqué, le couple, de nouveaux résidents de Rivière-du-Loup originaires du Nouveau-Brunswick, avait laissé le corps entre les mains des médecins pour qu’ils procèdent à des examens sur la cause du décès.
CAPTURE D’ÉCRAN, CIMT
L’Hôpital régional d’Edmundston
Choc
«Ils ont dit en gros qu’ils avaient perdu le bébé. […] Le monsieur pensait que le salon funéraire était venu le chercher. Supposément qu’ils auraient jeté le pot [contenant le bébé] dans le crématorium», affirme la maman de 23 ans, elle qui avait pourtant signé un document exigeant que le fœtus, plutôt que d’être détruit sur place, soit transféré à une maison funéraire afin de procéder aux cérémonies d’usage.
Le choc est difficile à encaisser, alors que Floralie était attendue avec impatience. «Je m’attendais à faire mon deuil, à essayer en tout cas, avec ma petite urne et ma fille dedans. Au moins, elle aurait été avec moi toute ma vie. Mais là, on est pris avec un placenta», dit Mme Shareck.
Le réseau de santé Vitalité, qui chapeaute l’hôpital d’Edmundston, a présenté ses excuses à la famille. La semaine dernière, l’organisme a confirmé à la station locale de TVA à Rivière-du-Loup «qu’une erreur de manipulation a malheureusement été faite à la morgue de l’hôpital», promettant de réviser en profondeur ses procédures.
Mise en demeure
Le couple endeuillé juge néanmoins que cette sortie publique est insuffisante, disant avoir reçu des réponses imprécises sur les circonstances entourant les faits.
En outre, l’incinération du fœtus leur aurait été présentée comme étant une hypothèse, pas une certitude.
PHOTO COURTOISIE
Me Marc Bellemare
Dans une mise en demeure envoyée vendredi, ils somment l’hôpital de s’expliquer clairement. Bien qu’ils n’écartent pas de réclamer un dédommagement, l’argent n’est pas une priorité, assure M. Richard, 31 ans. «Moi, je ne parle pas d’argent, je veux les réponses.»
«Des réponses particulièrement pour le cas de Floralie, et des réponses publiques pour ce qui est de l’ensemble des moyens qu’ils vont mettre de l’avant pour éviter que ça se reproduise», précise leur avocat Marc Bellemare.
Le réseau de santé Vitalité n’a pas répondu aux questions du Journal, ce week-end.
CHRONOLOGIE
♦ 27 mars 2019
Mme Shareck apprend que le bébé qu’elle porte depuis cinq mois est décédé. Elle en accouchera le lendemain à l’Hôpital régional d’Edmundston.
♦ 5 avril 2019
Le couple est avisé par l’hôpital que le personnel a perdu la trace du fœtus.
♦ 8 avril 2019
La direction reconnaît qu’une erreur de manipulation s’est produite à la morgue de l’hôpital.
♦ 12 avril 2019
Les parents produisent une mise en demeure à l’attention de l’établissement.
EXTRAITS DE LA MISE EN DEMEURE
«Les parents avaient formellement avisé le personnel de leur intention de récupérer le corps, afin de compléter leur deuil et de procéder aux cérémonies d’usage. Or, le vendredi 5 avril dernier, ils ont appris avec stupéfaction que vous aviez “perdu le bébé”.»
«Vous comprendrez que le choc subi par les parents est immense. Ils éprouvent depuis une anxiété sévère, des troubles de sommeil, des cauchemars et de l’hypervigilance.»
«Le minimum auquel les parents de Floralie et les autres usagers ont droit est de connaître les circonstances exactes de cette erreur grossière […].»