Un million $ en avocats

24 mai 2011 03h08

La commission Bastarache aura coûté plus d’un million de dollars aux contribuables québécois en frais d’avocats.

Publié par : Le journal de Montréal, Éric Thibault

Les honoraires de huit avocats mandatés pour représenter des parties impliquées durant la commission totalisaient 964 039 $, en date du 20 avril, selon un document du ministère de la Justice déposé à l’Assemblée nationale.

Le Ministère n’a pas exclu que ce montant puisse encore augmenter puisque des honoraires restent à être facturés.

De plus, ceux de Me Jean-Claude Hébert pour avoir représenté le Tribunal administratif du Québec ne sont pas compris dans ces dépenses. Ses honoraires pourraient atteindre 350 000 $, d’après les termes d’un contrat de gré à gré.

Ce million s’ajoute aux 5200000 $ en frais d’opération que la commission d’enquête sur le processus de nomination des juges a engendrés. Parmi ces frais, notons les salaires du commissaire Bastarache, à 250 $ l’heure, et du procureur-chef de la commission, Me Giuseppe Battista.

«Manufacture à argent»

Au tarif horaire de 225 $, la représentante du gouvernement du Québec, Me Suzanne Côté, et l’avocat du premier ministre Charest et du Conseil exécutif, Me André Ryan, arrivent au sommet de la liste. L’avocat de Marc Bellemare, Me Rénald Beaudry, suit loin derrière.

«Les Québécois ont le sentiment qu’on a ri d’eux avec cette commission qui n’était pas celle qu’ils souhaitaient avoir», a plaidé la députée péquiste Véronique Hivon, critique de l’opposition en matière de justice.

«On a vainement demandé au gouvernement de déposer ses factures, dont celles de Me Ryan qui aurait dû travailler 10 heures par jour, de juin à octobre, sans aucune journée de vacances, pour en arriver à ce montant. C’est préoccupant».

Pour le chef de l’ADQ, Gérard Deltell, cette «mascarade ne fut qu’une manufacture à faire de l’argent pour les avocats».

« Indécent » selon Me Bellemare

Marc Bellemare estime que la facture des honoraires d’avocats est à l’image du reste de cette commission, soit « deux poids, deux mesures ».

« C’est indécent, a réagi l’ex-ministre de la Justice lorsque joint par le Journal. Les citoyens ont raison de se questionner. »

Me Bellemare – dont les déclarations furent à l’origine de la commission (les « pressions colossales » qu’il a dit avoir reçues de collecteurs de fonds du PLQ pour nommer des juges) – estime que « pour le même travail, il y a une disproportion » entre les honoraires versés à Me Ryan et à Me Beaudry.

« La grande question, c’est de savoir si les honoraires versés à l’avocat du premier ministre pour la commission couvrent aussi son travail dans les poursuites civiles qui m’opposaient à M. Charest », a commenté l’ex-ministre libéral qui a payé « 130000 $ de (sa) poche » en frais d’avocats dans ces poursuites en diffamation, abandonnées depuis.

Le porte-parole du premier ministre, Hugo D’Amours, a réitéré que les honoraires de 265257 $ résultaient « uniquement » du travail de Me Ryan à la commission. Ses frais liés aux poursuites ne seront pas divulgués. C’est un litige « privé » du « citoyen » Jean Charest.

Outrés

Pour la Ligue des contribuables, on aurait pu « trouver un moyen moins coûteux pour en arriver au même résultat ».

« Les citoyens n’en ont pas eu pour leur argent et ils auraient raison d’être outrés en voyant ces factures d’avocats », selon sa directrice générale, Claire Joly.